Texte du grand gagnant du concours de récit
Voila, comme promis, voici le texte du gagnant du concours de récit, j'ai nommé ombreargent.
En esperant qu'il vous plaira autant qu'au jury!
Le paria
Les volutes de fumées bleues s’élèvent lentement dans l’air saturé d’humidité de la chambre. L’homme assis, face à la baie en vitrocéramique, regarde fasciné les mouvements lents et sensuels de la fumée de cigarette, qui finit lentement de se consumer, en laissant échapper des arabesques aux formes étranges et énigmatiques. D’un geste vif il l’écrase dans un cendrier et reporte son attention par delà la surface de verre et d’acier. Les premiers rayons du soleil entrent dans la pièce et éclairent timidement l’angle du lit. La journée va encore être une véritable fournaise. Malgré le vrombissement régulier des filtres à humidités et les condensateurs cryo-régulés, l’air reste toujours aussi désagréable à respirer. Loin en contrebas, les docks de chargement de la station orbitale commencent à prendre vie et une multitude de vaisseaux-remorqueurs s’agitent déjà en un ballet frénétique et palpitant. Les balises de repérage des transporteurs légers clignotent de manières frénétiques et constellent de mille couleurs le manteau de nuit de l’espace froid et lugubre.
Le soleil, continuant son Ascension, il devient difficile de soutenir son rayonnement. Après avoir regardé une dernière fois l’astre flamboyant, l’homme commande la fermeture des panneaux solaire. La pièce se retrouve alors plongée dans une pénombre qu’il affectionne tout particulièrement.
Un signal sonore déchire soudain le silence de la chambre. L’homme se lève lentement et active vocalement la commande du communicateur.
« Jovenn ? Jovenn c’est toi ? Bon sang tu peux brancher le videocran s’il te plait ? »
La voix, déformé par le communicateur, trahit une certaine nervosité.
« Pour quoi faire Vorlek ? On n’a pas besoin de se voir pour se parler »
« Moi si. J’aime voir à qui je m’adresse. Y à rien de plus flippant que ces foutus écrans noirs. »
« Il te suffit d’aller faire un tour sur les bases de données d’Infinitycorp à la rubrique des criminels dont la tête est mise à prix. Tu télécharge mon portrait robot et tu le colle sur ton écran. Je suis pas sur de la ressemblance exacte, mais bon, ça devrait te rassurer et te permettre de moins angoisser. Je m’en voudrais d’être à l’origine de ton troisième ulcère. Après tout, tu es mon commanditaire préféré."
« Pour un Jenquaï, t’as vraiment de l’humour à revendre tu sais ! Comment un paria de ton espèce, un renégat à ses traditions et à sa caste à pu réussir à survivre aussi longtemps dans ce monde impitoyable ? C’est vraiment une question que je me suis souvent posée. D’habitude les membres de ton peuple sont des gens très bien comme il faut. Bon ce ne sont pas des rigolos, ils sont même un peu coincés, mais ce sont des gars honnêtes et travailleurs. Toi t’es l’un des pires fumiers que je connaisse. Comment t’explique ça ? On à pas été gentil avec toi quand tu était petit ?."
Malgré les années, Jovenn ne parvenait toujours pas à supporter l’humour bon marché et les remarques subtiles de Vorlek. Mais il était à sa manière, un employeur respectable et il n’avait jamais cherché à le doubler depuis qu’ils travaillaient ensemble. D’une vois monocorde, Jovenn repris la parole.
« Dit moi Vorlek, puisque l’on en est aux confidences. Comment un Terran aussi peu doué que toi pour les affaires, à réussit à s’en sortir loin de la protection de sa puissante famille ? Tu devrais penser à leur donner de tes nouvelles de temps en temps. Enfin pour cela il faudrait que tu leur rembourse d’abord l’emprunt à long terme que tu leur à fait. C’est ton père qui serait ravie de te mettre la main dessus. Ce serais de chouettes retrouvailles quand même tu trouve pas ? La famille au grand complet pour fêter le retour de l’enfant prodigue."
Un long silence ponctua cette dernière réplique et le Jenquaï imagina avec amusement, le Terran en train de fulminé, rouge de colère devant son écran noir.
« bon allez ça va laisse tomber. Parlons un peu boulot. Tu sais pourquoi je te contact ? »
« Oui je m’en doute un peu Vorlek »
« Mon client à depuis peu un petit souci qu’il aimerait voir régler assez rapidement. Un concurrent un peu trop chanceux et ambitieux. Et tu sais comme moi que l’ambition peu être la cause de bien des problèmes de nos jours. »
« je t’écoute avec attention »…
…Market Street, deux heures plus tard. La station est en effervescence. Les gens marchent d’un pas rapide dans les allées en un flot ininterrompu, de corps et de regards. Perdu dans la multitude, ils avancent droit devant eux, sans même se rendre compte de l’odeur de pourriture que les coursives étroites dégagent. Un mélange écœurant de pollutions, de misères et de résignations. La chaleur suffocante me prend à la gorge. Les cryo-régulateurs, chargés d’assurer la qualité de l’air et la stabilité de la température, ont vraiment besoin d’être réparés. Cette maudite station part vraiment en lambeaux. A l’angle d’une ruelle, des mômes ont ouvert une borne d’incendie et s’amusent à traverser le miroir liquide et argentée craché par le système de refroidissement qu’ils ont soigneusement endommagé. Qu’ils en profitent parce que la sécurité va pas tarder à leur tomber dessus. Les gens ont à peine remarquée l’incident et se remettent déjà en marche. Personne ne fait attention à rien ici. C’est pour ca que je me sens autant en sécurité et que j’aime y faire escale.
Le passage à la capitainerie et au poste de contrôle ne sont que de simples formalités et je me retrouve bientôt dans la rassurante intimité de mon vaisseau. Il n’est plus tout jeune mais il à fait ses preuves. C’est un modèle de combat typique de mon peuple. Rapide et véloce, il réagit à la moindre de mes sollicitations. Il est comme une extension de moi-même. Lorsque je suis assis la, aux commandes de cette machine de guerre, je me sens renaître et je retrouve alors tout l’héritage de mes origines. L’espace m’appartient et je peux le sentir palpiter et vibrer autour de la coque et au tréfonds de mon être, au cœur de mon âme…
…Dans un vrombissement sourd et rassurant, les moteurs de mon navire, m’arrache à l’attraction de la station, masse grouillante de lumière et d’acier. Je m’allume une clope. Ces saletés me tueront, mais c’est l’une des nombreuses saloperies Terran que j’apprécie au plus au point. Comme chaque fois les volutes de fumées bleues forment d’étranges ellipses sur la surface de vitro-céramique de mon cockpit. Je reste un moment le regard perdu dans le néant, à regarder la fumée danser et lentement se dissoudre. Vorlek à raison je ne suis qu’un paria. Mais je n’échangerais ma vie pour rien au monde. Je prends le meilleur de ce que cette existence peut me réserver et je ne compte pas me résoudre de si tôt à rentrer dans le rang. De toute façon, mon propre peuple me ferais exécuter s’il me mettait la main dessus. Je ne suis pour les Terran qu’une anomalie, et pour ceux de mon sang une hérésie.
La voix de l’opérateur de vol de la passerelle de contrôle, chargé de réguler le trafic, me tire brutalement de ma méditation, me donnant l’autorisation de quitter Antares.
Un sourire éclaire un court instant mon visage et d’un mouvement lent et mesuré j’active mes réacteurs à pleine puissance. Bientôt l’espace, sombre et lugubre, se transforme en une myriade de traînées lumineuses alors que mon navire plonge dans l’immensité stellaire…
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